Le Secrétariat d’Etat de la production Culturelle algérien a ouvert des réunions virtuelles très suivies durant le mois de mai 2020, année du confinement de la planète pour cause du COVID – 19. L’occasion de réunir des acteurs culturels et des artistes sur trois générations, et d’échanger des expériences souvent douloureuses mais toujours constructives.
Le 15 avril 2020, l’UNESCO a lancé une consultation et a crée une plateforme numérique «Résili-Art» sur la situation de l’artiste et sa précarité en période de crises et de confinement, mettant en exergue deux sujets spécifiques: les droits sociaux et économiques de l’artiste et l’environnement numérique de notre époque.
Dans le cadre de la mise en œuvre de son plan d’action institutionnel, le Secrétaire d’État de la Production Culturelle, Salim Dada, a organisé trois réunions de deux heures chacune les 4, 15 et 30 mai 2020, de 14 heures à 16 heures par visioconférences qui constituent la première consultation internationale sur «la loi de l’artiste»: «L’artiste entre Créativité et Résilience».
Cette consultation en ligne, regroupant des artistes, des écrivains, des professionnels du monde de la culture, des universitaires et des experts algériens et étrangers, a permis d’échanger des expertises, de s’exprimer quant à la situation et au statut de l’artiste en Algérie, de proposer des pistes de réflexions adéquates au contexte actuel en Algérie et au Maghreb et de définir des axes et des orientations pour le projet de loi sur la situation de l’artiste.
Cette initiative intervient dans un contexte de crise et souligne les failles du Monde Culturel, qui reflètent celles du monde aujourd’hui: la disparité et la difficulté d’accès à la Culture entre les régions d’un même pays, la disparité des situations entre les pays, la difficulté pour les artistes d’émerger et de vivre surtout lorsqu’il s’agit des secteurs non «vectorisés» par l’écran du numérique: le livre, le théâtre…
L’ouverture de la consultation a été assurée par la Ministre de la Culture Malika Bebdouda. Les échanges étaient modérés par le secrétaire d’État Salim Dada. Les séances étaient ouvertes à la demande aux publics intéressés.
La première séance du 04 mai était consacrée à la situation des artistes et des organisateurs d’évènements culturels dans les trois pays du Maghreb.
Y participaient :
Salim Dada, musicien ,chef d’orchestre, Secrétaire d’Etat et modérateur de la séance/Rachid Briki, de l’Agence Algérienne pour le Rayonnement Culturel/ Maissa Bey : romancière, animatrice de l’association «Paroles et écritures » en France/Hakim Taoussar : conseiller juridique et culturel international, ancien directeur général de l’ ONDA (Office National des Droits d’Auteur et des droits voisins) / Mounes Khammar : scénariste, réalisateur et producteur, fondateur de la société de production de cinéma et audiovisuelle “Saphina Production”/Ayad Ziani Chérif : acteur et réalisateur de théâtre, fondateur et directeur de la troupe de théâtre «El Qalaa», membre du conseil national des arts et de la littérature/ Zahia Ziouani : cheffe d’orchestre, orchestre symphonique Divertimento, France/ Imed Alibi : percussionniste tunisien, conseiller culturel et directeur artistique de plusieurs festivals en France, Tunisie et Maroc, directeur du Festival International de Carthage/
Brahim Al-Mazned : entrepreneur culturel marocain, Directeur et fondateur de “Visa for Music» membre de la Banque d’expertise UE/Unesco 2019-2022/Christine Merkel : ancien membre du Parlement européen, directrice de la division de la Culture, Mémoire du Monde de la Commission allemande pour l’UNESCO/Toussaint Tiendrébéogo producteur et consultant en politiques cinématographique et audiovisuelle, chargé des politiques et industries culturelles à l’Organisation Internationale de la Francophonie.
Les échanges entre les intervenants ont été spontanés, paradoxalement libérés par le format numérique qui supprime la pression des auditoires. L’espace de cette première séance nous sommes allés sur le terrain en Algérie, en Tunisie, au Maroc, et aussi en France, au Koweit, et au Canada, et nous avons constaté que les problématiques sud -sud étaient souvent les mêmes.
Les pays du Maghreb n’ont pas pris le temps de légiférer sur la création culturelle et sur le statut de l’artiste. Les artistes dans ces pays sont pourtant présents et fournissent du lien dans leur société mais leur création reste toujours un parcours du combattant.
La Culture manque de moyens : L’Unesco qui a perdu un quart de son budget ne peut plus donner qu’un cadre juridique et des appuis moraux. L’accroissement de la fracture entre les artistes «numériques» qui savent profiter de ces techniques et les autres qui en sont victimes, notamment par le piratage et l’absence du respect des droits d’auteur.
Il faut sortir des grands évènements médiatico-culturels type «capitale culturelle» et s’efforcer travailler au quotidien dans la société où l’accès à la culture est considéré comme un luxe peu abordable et non prioritaire.
La deuxième séance du 15 mai était consacrée au cinéma, à la danse et à l’industrie numérique dans la diaspora algérienne.
Y participaient :
Abou Sofiane Lagraâ : chorégraphe directeur de la compagnie La Baraka, avec son épouse Nawel, France ; fondateur du « ballet contemporain d’Alger »/Samy Lamouti, artiste digital spécialiste jeux vidéos et effets spéciaux cinéma, Montréal/Hamza Bounoua artiste plasticien et designer, établi au Koweït, commissaire du Forum arabe international pour les arts plastiques à Doha, fondateur de la galerie «Diwaniya» à Alger/Feriel Gasmi Issiakhem, architecte d’intérieur, designer, curatrice, scénographe, et commissaire de plusieurs expositions en Algérie et à l’étranger/Adila Bendimerad, scénariste, comédienne de théâtre et actrice de cinéma, fondatrice de la société de production cinématographique « Taj Intaj »/Mourad Senouci, sociologue chercheur associé à l’Université d’Oran, auteur de théâtre, journaliste radio et télévision, directeur du Théâtre régional d’Oran.
Il faut noter que cette journée a coïncidé avec la célébration de «la Journée internationale du vivre ensemble en paix» le 16 mai commémorée par l’ONU depuis 2018, à l’initiative de l’Algérie.
Les divers artistes de la diaspora algérienne qui participaient à cette deuxième séance ont tous réussi dans leur pays d’adoption et interviennent ponctuellement en Algérie. Le propos du chorégraphe Abou Sofiane Lagraâ reflète cette condition: «Je défends l’idée d’un artiste citoyen qui est complètement engagé dans le territoire dans lequel il vit tout en s’inscrivant toujours dans l’écriture de projets, en pensant au monde de demain».
Ils sont tous assez critiques sur la situation du secteur culturel et vivent une sorte de désenchantement national pourrait- on dire en paraphrasant une écrivaine tunisienne et en même temps manifestent une foi dans la culture absolument remarquable. Trois recommandations communes se dégagent : Professionnaliser la culture –Accompagner les artistes – Libérer les énergies.
La troisième séance du 30 mai était consacrée aux jeunes acteurs culturels de l’Algérie
Y participaient:
Abdelhamid Bedrane, écrivain / Mouna Bennamani, plasticienne agence artistique/ Nadjib Gamoura, musicien bassiste /Ahmed Khemis, danseur /Amel Mihoub, plasticienne galeriste /Yahia Mouzahem producteur audiovisuel /Amine Soufari, pianiste / Leila Touchi, actrice / Hamza Al Djazairi, scénariste / Kenza Mebarki, enseignante/Nesroun Bouhil organisateur d’évènements culturels / Florisse Henschel, représentante de l’Unesco.
Les diverses contributions tournaient autour des questions financières et des difficultés des
artistes à exercer en Algérie, quelque soit leur secteur d’exercice. Cette situation semble
assez similaire dans les trois pays du Maghreb, même si des initiatives sont en cours notamment fonds de soutien et appels à projets. Le statut juridique et social des artistes dans les
trois pays n’est pas convenablement codifié, cela doit être la première étape d’une revalorisation du secteur.
Le rapport des trois séances organisées par le Secrétariat d’Etat de la production culturelle algérien avec le concours de l’Unesco, sera rédigé et rendu public par le Secrétariat d’Etat d’ici le 15 juillet2020.
En Tunisie, «le Fonds Relance Culture» a été mis en place le 22 mars 2020 par le ministère de la culture: les cinq mécènes qui jusqu’à présent y participent sont : Tunisie Télécom, La Fondation Rambourg , La Fondation Biat,La Kamel Lazaar Foundation ,Carrefour Tunisie .
Les donateurs peuvent jouir d’avantages fiscaux dans le cadre de la loi sur le mécénat Art 49LFC 2014.
Aujourd’hui, le 4 juin 2020, à la Cité de la Culture à Tunis une journée de consultation est lancée autour du projet de loi sur le statut de l’artiste. Un sujet qui doit rassembler: la culture.
Plus d’infos ICI!